Conseil Européen : Non, la Grèce n’est pas sauvée, les peuples devront encore payer !

le 26 mars 2010

Je ne partage pas du tout, mais vraiment pas du tout l’ambiance médiatico-politique organisée autour du Conseil des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne qui s’est tenu hier. On nous répète à l’envi que le Conseil européen aurait décidé de sauver la Grèce. La vérité, c’est que le Conseil européen a continué d’inciter la Grèce à appliquer une politique de super austérité de blocage, voire de baisse des salaires, de réduction d’emplois publics, de recul de l’âge du départ à la retraite, uniquement pour, comme le dit le texte  « redonner pleine confiance aux marchés ». 

Lisons ces deux phrases : «  Nous soutenons pleinement les efforts du gouvernement grec et saluons les mesures additionnelles annoncées le 3 mars qui permettront d’atteindre les objectifs budgétaires pour 2010. Nous reconnaissons que les autorités grecques ont pris des actions ambitieuses et résolues qui devraient permettre à la Grèce de retrouver la pleine confiance des marchés. Les mesures de redressement prises par la Grèce constituent une contribution importante au renforcement de la soutenabilité budgétaire et de la confiance des marchés.  Le Gouvernement grec n’a demandé aucune aide financière. Par conséquent, aujourd’hui, aucune décision n’a été prise pour activer le mécanisme décrit ci-dessous. »  

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Le Conseil européen a procédé à un tour de passe-passe en faisant semblant de mettre de l’argent sur la table pour soutenir la Grèce, alors qu’en réalité, il s’agit d’une sorte de mesure préventive qui sert soit disant à abaisser les taux d’intérêt de l’argent que la Grèce est contrainte d’emprunter sur les marchés financiers internationaux. La mécanique mise en place sert donc bien à alimenter en permanence les grandes banques mondiales et ces marchés financiers internationaux qui se font chaque jour des milliards et des milliards de profit sur le dos du peuple grec et demain sur celui d’autres peuples européens. Car les déficits des Etats sont en général le résultat des cadeaux qui ont été faits à la haute finance et à la minorité des plus riches dans chaque pays, combinés avec une baisse de l’emploi et des salaires. 

Mais la nouveauté extrêmement grave et inquiétante est désormais l’introduction du Fonds monétaire international dans les finances européennes avec toutes les conséquences que cela induit. En effet, le FMI n’est pas réputé pour défendre l’emploi, les capacités humaines, les services publics, les systèmes de protection sociale. Partout où il passe c’est le rouleau compresseur de la destruction des droits sociaux, démocratiques, ainsi que des services publics. 

D’ailleurs le texte de l’accord prévoit que le mécanisme décidé n’est qu’un système activable en dernier recours, « ce qui signifie en particulier, est-il écrit, que le financement de marché est insuffisant»,  mais, de surcroît, tout prêt est conditionné à l’amplification de l’austérité. Ainsi le texte dit : « Les déboursements des prêts bilatéraux seraient décidés par les Etats-membres de la zone euro à l’unanimité et soumis à de fortes conditionnalités, sur la base d’une évaluation menée par la Commission européenne et la Banque Centrale Européenne. Nous nous attendons à ce que les Etats membres participent au prorata de leur part au capital de la BCE ». De même, le taux moyen d’emprunt européen n’existe pas puisque l’objectif du mécanisme adopté ne sera pas, je cite : « de fournir un financement aux taux moyens des emprunts des pays de la zone euro, mais comportera des incitations pour retourner vers des financements de marché le plus vite possible par une tarification adéquate du risque. Les taux d’intérêt seront non-concessionnels, c’est-à-dire qu’ils ne contiendront aucun élément de subvention. Les décisions prises dans ce cadre seront pleinement compatibles avec le Traité et les législations nationales ». 

Ceci confirme bien que le Conseil européen veut que les Etats retournent « vers des financements de marché » en insistant sur une  « tarification adéquate du risque » ce qui veut dire en bon français que ce sont les peuples qui paieront le haut niveau des intérêts de la dette via les réductions de dépenses sociales, la privatisation des services publics, l’allongement de la durée du travail, la pression sur les salaires, etc.

Ainsi, ce que nous n’avons cessé de dénoncer au moment des débats sur l’acte unique européen, sur les traités de Maastricht et de Lisbonne, se révèle rigoureusement exact. L’ultralibéralisme financier est incompatible avec la solidarité européenne. Ce n’est pas l’Europe des peuples qui se construit. C’est l’Europe au service des marchés financiers. Les peuples peuvent constater qu’on leur a menti sur toute la ligne sur la nature de l’Euro comme monnaie « la plus stable du monde » qui allait ouvrir « une nouvelle ère de prospérité ». Aujourd’hui une commissaire européenne, Mme Reding déclare que nous sommes « au début d’un tsunami ». Autrement dit, des ravages considérables vont être portés contre les pays, les Etats, les services publics, les droits sociaux, les systèmes de protection sociale. Le Portugal, l’Espagne, l’Italie, l’Irlande sont déjà clairement dans le collimateur mais aussi la France et c’est aux populations qu’on veut faire payer cette crise et ces logiques ultralibérales des traités européens. Alors que l’urgence nécessiterait de desserrer le garrot du pacte dit « de stabilité économique et monétaire », le Conseil européen vient de décider le contraire. Il veut renforcer les mécanismes de ce pacte en réduisant encore les dépenses publiques et sociales et en renforçant la surveillance des dépenses publiques.

On peut lire en effet à l’avant dernier chapitre du texte adopté par le Conseil européen cette phrase : «La surveillance des risques économiques et budgétaires et les instruments de leur prévention, y compris la procédure pour déficit excessif, doivent être renforcés. En outre, nous devons disposer d’un cadre robuste pour la résolution des crises respectant le principe de la

responsabilité budgétaire de chaque Etat-membre ». 

Tout ceci est inquiétant et révoltant ! Il faudra que les peuples européens se lèvent en masse et dans l’union pour barrer la route à tous ces briseurs de vies humaines. Le Parlement a voté un texte permettant une initiative citoyenne de pétition.  Dans l’unité la plus large des citoyens et des organisations progressistes, utilisons ce mécanisme pour lancer une grande pétition européenne afin de changer les traités. Dans l’unité, agissons ici, du quartier à l’Union européenne, contre la super austérité, le blocage des salaires, pour le droit au travail et à la retraite. 

D’autres choix existent. L’Euro ne doit plus être un outil pour la spéculation mais un moyen pour la coopération. Le pacte dit de stabilité doit être changé en un nouveau pacte solidaire et écologique pour l’emploi, le développement durable, la formation et la recherche. La Banque centrale européenne doit être placée sous contrôle des pouvoirs politiques et des peuples et aider au refinancement des dettes à des taux d’intérêts nuls, au financement de l’emploi, des services publics et sociaux, des petites et moyennes entreprises, des exploitations agricoles. Il faut en finir avec les ravages de la libre-concurrence et de la liberté de circulation totale des capitaux et des marchandises. Plus que jamais, l’unité des peuples européens contre les forces de l’argent et les dirigeants européens qui sont leurs mandataires directs est indispensable, du quartier à l’entreprise, de l’université au village, jusqu’aux institutions européennes elles-mêmes.


0 commentaires


Colvert 26 mars 2010 à 18 h 43 min

Entièrement d’accord avec vos deux derniers paragraphes il est indispensable que nous entrainions tous les vrais partis de gauche à soutenir cette position et à se”battre” et un maximum de travailleurs et leurs syndicats à en faire autant.

GILLERON Bernard 29 mars 2010 à 14 h 07 min

Avant la crise des subprimes, les arrogant banquiers faisaient comprendre, à Davos, que les Etats devaient laisser les rênes de l’économie à la Haute finance.
Puis au moment de la crise, privés de liquidités par l’assèchement de leurs pactoles, par les “mauvais payeurs” de maisons vendues à des insolvables et les industries(Automobile notamment) incapables de rembourser leur dette.
Alors les États ont été rappelés à la rescousse pour renflouer leurs caisses vides(ce qu’ils ont fait sans aucune contrepartie).
Aujourd’hui les caisses sont de nouveau pleines, grâce à l’argent des États(i.e. des contribuables) et à la reprise effrénée de la spéculation boursière, et la Finance Internationale retrouve sa superbe et son hégémonie sur les États. Pire! elles spéculent sur les dettes de ceux-ci.
La question se pose vraiment de la possibilité du changement de politique dans notre pays en 2012, vu que se fondant sur le pacte de stabilité de Maastricht, vis à vis d’une France à Gauche, les spéculateurs vont se déchainer contre sa dette, bien plus qu’ils ne l’ont fait contre la Dette de Sarkozy, leur ami et serviteur.
Le programme commun de la Gauche devra être très clair sur ce point:: ne pas céder aux oukases de la BCE, du Conseil Européen, , du FMI et des Agences de notation qui ne vont pas se priver de dégrader la note de la France (de AAA encore aujourd’hui, ça va tomber à AA ou même moins)
Pour limiter les besoins de financement sur les Marchés, il sera plus que jamais nécessaire de redresser les Déficits Publics, en faisant payer leur dû aux gros revenus, en abolissant la loi TEPA et ses sœurs.
Faudra-t-il sortir de l’UE ou de la zone Euro?
C’est une question que je pose, mais pour laquelle je n’ai pas de réponse.

BoBW 30 mars 2010 à 8 h 06 min

L’Idée, chez des certains citoyens de droite , mais aussi de gauche, c’est que le bilan Euro est catastrophique et qu’il serait peu-être bénéfique de reprendre notre souveraineté nationale avec le Franc, quitte à établir des liens avec les autres peuples de l’UE fait son chemin et il faut la renforcer….

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