Commençons par taxer les mouvements de capitaux

le 2 décembre 2010

Les terribles et dramatiques convulsions qui secouent de plus en plus violemment l’Europe dépassent, et de loin, ce que nous avions nous-mêmes prédit dans la dénonciation de la malfaisance des traités de Maastricht et de Lisbonne. S’ils demeurent en l’état, l’idée européenne va mourir sur le bûcher de l’eurocapitalisme déchaîné.

L’incroyable paradoxe -en apparence- réside dans le comportement des institutions européennes et des Etats. Ils  ont financé des banques qui, aujourd’hui, s’attaquent aux mains qui les ont nourries, c’est-à-dire à ces mêmes Etats en leur imposant des taux d’intérêt usuraires pour gonfler les profits privés. Au final, les peuples sont invités à payer la note par  d’indescriptibles purges sociales, jamais connues en temps de paix. En réalité, le fonds de stabilité financière européen participe de cette même démarche.

On voit ici la cruelle bestialité d’un capitalisme financier mondialisé écrasant sans vergogne les peuples. Les gouvernements, pourtant représentants élus par les citoyens, sont bien les complices de ces marchés financiers, à qui ils ont retiré toute contrainte. Ils peuvent bien verser quelques larmes  de crocodile, c’est toujours du côté des requins des marchés financiers qu’ils se situent. Les chiffres sont parlants. Les Etats ont garanti plus de 400 milliards d’euros d’aide aux banques. C’est exactement cette somme, 400 milliards, qui, pour l’instant, a été économisée par la réduction des  dépenses sociales et publiques dans les pays européens les plus touchés par les plans d’austérité.

Le Premier ministre, M. F Fillon, vient ainsi, après l’abrogation du droit à la retraite à 60 ans, de confirmer que l’impôt sur la fortune serait démantelé pour faire de nouvelles économies sur les dépenses utiles aux populations et, en prime, il propose d’offrir le projet d’assurance dépendance au privé et de s’attaquer à la protection sociale. Cette politique est terrible pour le monde du travail et de la création. Elle est dangereuse et inefficace. Elle pousse l’Europe dans un mur. Pire ! Les gouvernements, le Conseil européen et la commission européenne se transforment en généraux en chef de la guerre que livre la finance aux peuples. Disons le tout net, ensemble, ils servent une véritable dictature des marchés financiers.

Les mots ne sont pas exagérés. On ne peut qualifier autrement le fait que la Commission, qui ne détient aucune légitimité citoyenne, puisse décider a priori des budgets de chacun des Etats membres, à la place des élus du suffrage universel que sont les parlementaires. Cette stratégie, combinant austérité renforcée et autoritarisme, nourrit le terreau fumant des thèses de l’extrême droite dans toute l’Union européenne. Il y a danger à tout point de vue.

Nous nous réjouissons que de Lisbonne à Londres, de Bucarest à Madrid, de Paris à Berlin, à Dublin et à Rome, les travailleurs commencent, avec leurs syndicats, à se lever contre l’austérité, l’atteinte aux libertés et la militarisation. Nous voulons avec eux défricher le chemin d’une autre Europe sociale et solidaire, écologique, démocratique, pacifique.

Nous en appelons au débat populaire, à la réflexion de nos concitoyens dans toute l’Union européenne, à l’apport des forces progressistes pour qu’elles s’unissent contre l’Europe de l’austérité. La justice pour l’efficacité sociale et écologique est la seule voie de l’efficacité économique. C’est parce que depuis des décennies les dogmes ultralibéraux européens ont organisé une répartition de la richesse produite par le travail au bénéfice du capital que les déficits et l’endettement se sont aggravés. Ce sont  les décisions européennes déclinées en lois nationales de dérèglementation qui ont permis le prélèvement permanent de la haute finance sur le travail, l’économie et les Etats en poussant, d’une part, les familles populaires dans les souffrances, la mal vie, la pauvreté, la précarité et, d’autre part,  les Etats à la ruine en les privant de recettes fiscales au profit des fortunes privées, logées dans les paradis fiscaux et spéculant contre les salariés et le travail.

Il n’y a pas d’autre option valable pour le redressement économique et écologique soutenable qu’une augmentation de la rémunération du travail et l’amélioration générale des revenus, combinant salaires, fiscalité plus juste, haut niveau de protection sociale, développement des services publics accessibles à tous, comme outils pour combattre les inégalités. Une autre croissance suppose des investissements publics et privés, le développement d’innovations environnementales par un nouveau crédit public, ciblant d’abord la création de travail et d’emplois, la santé, l’éducation, la formation, la culture, la recherche.

Bref, il faut rompre avec la domination du concept de la valeur actionnariale au profit de la valeur travail pour un nouveau pacte social et environnemental européen.

Nous en appelons aux mobilisations populaires unitaires européennes sur deux axes susceptibles de rassembler immédiatement :

D’abord l’action pour modifier les missions et le rôle de la Banque centrale européenne, vers des objectifs de développement humain, en lui permettant la création monétaire afin de geler tout ou partie des dettes des Etats et par l’activation d’un nouveau crédit pour refinancer les banques, de telle sorte qu’elles impulsent un crédit à taux d’intérêt quasi nul dès lors qu’il sert le travail, les infrastructures utiles et les activités productives, respectueuses de l’environnement, l’éducation, la formation, la recherche, dans le cadre d’un fonds de développement social et environnemental.

D’autre part, les forces progressistes européennes, les associations, les peuples pourraient se mobiliser dans un grand mouvement pour la mise en place d’une taxe européenne sur les transactions financières. Le Parlement vote de multiples résolutions incluant désormais ce projet. Le Président de la République en a également parlé. Alors, aux actes ! Au moment où on débat des recettes du budget européen, voilà une rentrée, qui, ajoutée à la perception des recettes de TVA détournées, permettrait de doubler le budget européen et de créer un fonds de solidarité et de développement pour l’Afrique.

Ensemble, le mouvement populaire et l’unité progressiste peuvent sortir l’Europe du gouffre où le mène l’ultralibéralisme.


0 commentaires


BIGONSKI Suzanne 2 décembre 2010 à 10 h 27 min

ça donne vraiment des frissons de terreur ce texte, mais qu’allons nous devenir, que vont devenir nos enfants et nos petits enfants ?

ellejo 2 décembre 2010 à 19 h 25 min

Eric Cantona a lancé un buzz sur le net en demandant à tout le monde de vider son compte en banque le 7 décembre prochain, afin de mettre à mal le système financier. « La révolution se fait par les banques. Pour parler de la révolution, on va pas prendre les armes, on va pas aller tuer des gens. Il y a une chose très simple à faire (…) Le système est bâti sur le pouvoir des banques. Donc il peut être détruit par les banques. Au lieu d’aller dans les rues faire des kilomètres (pour manifester), tu vas à la banque de ton village et tu retires ton argent. Et s’il y a 20 millions de personnes qui retirent leur argent, le système s’écroule: pas d’arme, pas de sang, rien du tout. A la Spaggiari », explique Eric Cantona dans une vidéo qui a été réalisée lors d’une interview avec Presse-Océan

http://www.foot01.com/media/cantona-veut-braquer-les-banques-le-7-decembre,63071

Canelle 4 décembre 2010 à 19 h 10 min

ellejo, l’argent est fait pour circuler ; si nous agissons de la sorte, c’est un peu le “tout pour moi” et nous agissons comme les capitalistes.

Soyons sérieux dans nos achats, ne regardons pas les plus démunis comme des moins que rien et aidons-les ; il y a des associations sérieuses.

Vous pouvez sortir vos assurances vie (ceux qui en ont), ouvrir un compte au Crédit Coopératif et un livret NEF, afin de financer du social, des AMAP, des magasins bio…….rien ne va au CAC40…

Je peux vous dire que mon banquier ne m’a pas fait un grand sourire, ni de belles courbettes…

Patrick Albert 4 décembre 2010 à 12 h 17 min

Il n’y a aucune réforme à attendre de l’Union Européenne. Ses traités sont entièrement basés sur le libéralisme. C’est une erreur de faire croire que nous pouvons attendre quelque chose de cette Europe.

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